Nadia Hai – «Nous accompagnerons financièrement les territoires aux projets ambitieux »

Retrouvez l'interview de Nadia Hai, Ministre déléguée chargée de la Ville, dans la Gazette des communes

Alors que les cités éducatives fêtent leur première année d’existence, 40 nouvelles cités verront le jour en 2021. Nadia Hai, ministre déléguée auprès de la ministre de la cohésion des territoires, chargée de la ville, revient sur les espoirs placés dans ce programme qui va mobiliser plus de 100 millions d’euros d’ici à 2022.

Vous avez annoncé la création de 40 nouvelles cités éducatives en 2021 après les 80 déjà lancées en 2019. Quels espoirs placez-vous dans ce programme ?

Nous sommes partis d’un constat simple. Les enfants des quartiers prioritaires obtiennent le brevet avec près de dix points de moins que les autres. Dans ces quartiers, la proportion d’élèves issus de milieux défavorisés y est deux fois plus importante qu’ailleurs. En 2019, nous avons ciblé 80 de ces quartiers pour les porter en Cités éducatives. Nous y avons renforcé les financement, afin de mobiliser un certain nombre d’acteurs supplémentaires : des animateurs, des médiateurs, davantage d’associations qui oeuvrent ensemble pour sortir d’une politique de dispositifs, et focaliser sur le parcours de l’élève. Tous les jeunes issus de ces cités, doivent pouvoir en sortir avec une solution, que ce soit par un contrat en apprentissage, ou l’insertion professionnelle… il s’agit de leur offrir un parcours éducatif d’excellence. C’est pour cela que les Cités éducatives s’adressent également aux jeunes de 16 à 25 ans !

Pourquoi avoir décidé d’étendre l’expérimentation ?

Les premiers retours que nous avons sont très bons. Il y a une réelle mobilisation des acteurs, une fluidité de transmission au service du parcours de l’élève. Le confinement a montré que là où les Cités éducatives étaient déjà en place, le suivi des jeunes en a été facilité. Des tablettes ont été distribuées, du soutien scolaire organisé… Alors que dans les autres quartiers prioritaires, le suivi s’est avéré plus difficile. C’est pourquoi nous avons décidé de lancer 40 cités éducatives supplémentaires pour en faire une expérience à grande échelle. Si cela fonctionne nous ne nous interdisons pas de reconduire le programme et de l’étendre. Beaucoup de communes ne demandent qu’une seule chose : être labellisées à leur tour !

Justement, durant le confinement, beaucoup de cités éducatives ont utilisé des crédits pour doter les élèves et les familles d’équipements numériques. N’est-ce pas éloigné de l’esprit des cités éducatives ?

En ce qui concerne l’achat des tablettes, d’outils informatiques, de clés 4G…  10 millions d’euros supplémentaires ont été mis sur la table. La cité éducative est là pour soutenir, accompagner les familles, et apporter de l’excellence. Certaines familles ne sont pas en mesure de s’équiper en matériel informatique. On ne peut pas leur répondre que la cité éducative n’est là que pour proposer une offre culturelle et sportive. Si la continuité éducative n’est pas assurée au domicile de l’élève, nous n’aurons pas bouclé la boucle. C’est donc le rôle de l’Etat providence que de doter en matériel les familles qui n’en ont pas les capacités financières.

Avec ces 40 nouvelles cités éducatives, vous avez annoncé vouloir monter en gamme dans l’offre culturelle et sportive. Pouvez-vous donner des détails ?

Pour les 80 premières cités éducatives nous avions des critères très précis [NDLR : des quartiers d’habitat social de plus de 5 000 habitants, présentant des dysfonctionnements urbains importants et relevant de l’éducation prioritaire]. Pour les 40 suivantes, nous y ajoutons des critères qualitatifs en matière d’offre culturelle et sportive. S’il s’agit par exemple de créer des classes à horaires aménagés en sport, le ministère des sports sera parfaitement disposé à financer cet aménagement. S’il s’agit de musique ou de théâtre, là aussi, je suis prête à accompagner cette offre nouvelle avec des fonds de la politique de la ville. Mais nous n’imposerons rien. Ce que nous voulons, c’est encourager les territoires à être ambitieux dans les projets qu’ils proposent. En fonction de cela, nous les accompagnerons financièrement.

Qu’allez-vous mettre en œuvre pour que les jeunes de 16 à 25 ans ne sortent pas des radars des cités éducatives ?

L’école est maintenant obligatoire jusqu’à 18 ans, mais pour les 18 – 25 ans, il faut mettre l’accent sur l’insertion économique, l’apprentissage, et pas uniquement sur l’action sociale. Nous avons de nouvelles ambitions pour les quartiers prioritaires. J’en veux pour preuve les 20 cités de l’emploi actuellement expérimentées sur le modèle des Cités éducatives. Je vais travailler étroitement avec Brigitte Klinkert, la ministre déléguée, chargée de l’insertion, afin que le Plan d’investissement dans les compétences (PIC) puisse servir à apporter une réponse à ces élèves, notamment du point de vue de l’apprentissage. Pour ceux qui ne poursuivent pas d’études, la chaine « apprentissage – PIC – création d’entreprise » doit tout de suite se mettre en route pour leur permettre de trouver une solution. Ces jeunes ont le droit de faire des études, de créer des entreprises. Mais il faut laisser le temps à la machine de l’emploi et de l’insertion professionnelle de se mettre en route. Nous n’avons même pas un an de recul.

 

Publié le 18/12/2020 • Par Michèle Foin • dans "La gazette des communes"